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16 mai 2018 à 22:11

Comme un air de Provence

Comme l'année dernière, la fine équipe s'est réunie, toutes activités confondues, pour un week-end de convivialité. Cette année, nous avons traversé le Rhône pour partir en Drôme Provençale, et plus particulièrement dans les Baronnies. Comme camp de base, le charmant camping de l'Ecluse, sur la commune de Bénivay Ollon, niché au fond d'une petite vallée sans issue.  Après une arrivée en fin de matinée, chacun ayant pris ses quartiers dans bungalows et emplacement, quelques forces prises avec le pique-nique partagé, le groupe s'est divisé en 2, les roues fines et les gros boudins. Comprendre ici les cyclo sur la route et les VTTistes sur les chemins. C'est de la sortie de ce deuxième groupe que je vais vous parler.

Le départ se fait donc du camping même. Dans l'équipée, je me retrouve avec Marie et sa fille Justine, André sur son VTT électrique flambant neuf, et l'autre Damien. Pour débuter, la petite et tranquille route en faux plat montant qui remonte la vallée. Cela nous donne l'occasion de traverser le petit village de Bénivay Ollon, à quelques encablures du fond de la vallée de l'Eyguemarse. La chapelle perchée Saint Jean nous épie du haut de son rocher. Nous ne ferons pas le crochet pour l'admirer, son ascension étant beaucoup trop abrupte pour nos VTT. La fin de la route laisse la place à une piste DFCI, porte d'entrée vers le premier col de la journée, à savoir celui de la Vote. Le début se fait très agréable et roulant. Damien y prendra même goût, le réconciliant avec le VTT. Mais cela sera de courte durée. Passé la première épingle d'où le ruisseau débouche à main gauche, la pente se raidit nettement, réduisant fortement l'allure des troupes qui allaient jusqu'ici bon train. Les épingles s'enchainent l'une après l'autre, et la pente se durcit. Le groupe s'étire alors. André, malgré quelques hésitations à partir hors des sentiers battus, semblent prendre beaucoup de plaisir sur cette piste sauvage,où la vue se dégage petit à petit sur vallée. La montée se terminera par un faux plat plutôt agréable après de longues minutes d'effort. Tout le monde arrive petit à petit, mais toujours avec la bonne humeur.

La piste se poursuit par une petite descente très roulante, mais qui laissera rapidement la place à nouveau à de la montée, ce coup ci en direction du Col des Lantons ou une guitoune témoigne d'un camp de base pour certains. Comble du hasard, Damien reconnait une une yourte perchée où il a passé quelques nuits jadis. Il me demande si derrière se trouve la commune de Rochebrune, et ma confirmation dissipe tout doute le concernant. De là, nous basculons sur la gauche pour une descente toujours sur piste en direction d'une nouvelle vallée, celle de Chateauneuf de Bordette. J'indique alors à mes camarades qu'il faut descendre 126 m de dénivelé avant de bifurquer. Je reste alors concentré dans la descente, afin de ne pas louper l'embranchement,suspectant que la suite de l'itinéraire sera beaucoup moins large. Nous passons la ferme isolée du Rocher Florin d'où nous surplombons une clue, paysage typique des Alpes du Sud où la rivière s'est frayée un chemin avec le temps à force de pugnacité pour éroder le rocher. Juste après, le fameux carrefour recherché d'où s'échappe un petit sentier, mais bien indiqué par un imposant cairn.

Je m'arrête pour attendre les troupes, et leur indique que la tournure de la balade va nettement changer. Pour preuve, je leur montre l'entrée du sentier en lequel ils croient à une blague. Mais non, c'est bien par ici. Une racine rebelle à franchir dès le début donnera du fil à retordre aux troupes, coupant ainsi tout élan et invitant à la poussette juste après. André essaie de passer en force, mais en vain. Je l'aide à repartir avec son moteur qui fait patiner les roues au démarrage. Quelques petits conseils sur le passage des vitesses, et le voici reparti, titubant entre les bosquets laissant tout juste le passage de la sente. Pour ma part, je tente de monter sur le vélo, en forçant un peu sur le cuissot, faut bien l'avouer. Cependant, le sentier est tellement agréable dans cet environnement si sauvage où nous sommes aux aguets de voir débouler un sanglier. En haut, se profile déjà le troisième col du jour, celui de Serriès. Les copains arrivent en file indienne, cela permet de faire de belles photos avec la vallée en toile de fond.

Du col, nous apercevons notre prochain objectif, le fameux village de Rochebrune, perché sur son mamelon. La redescente se fait sur un nouveau sentier. D'abord en limite de prairie sauvage, ce dernier se faufile dans les buissons. Le début se fait assez joueur et rigolo, mais rapidement, les rochers font leur apparition, ajoutant du piment à l'itinéraire. La traversée d'un vallon avec une montée très raide et jonchée de rochers tendent mes camarades à me qualifier de fou. Pour le coup, je découvre tout autant qu'eux l'itinéraire, et ne sais pas vraiment à quelle sauce nous allons être mangé. Nous tentons de remonter sur le vélo, sur un sentier en balcon. Je pars bille en tête histoire de faire joujou, mais un passage raide et en épingle me fait m'arrêter pour attendre les autres. Les filles arrivent assez rapidement, quelque peu circonspectes de la tournure que prend le chemin. Justine ronronne un peu, mais je suis sûr qu'en vrai elle kiffe être ici. Marie, fidèle à elle même, suis le mouvement. Les garçons arrivent après quelques minutes d'attente, André à côté du vélo. Ce dernier virevolte dans tous les sens, boosté par les sauts de cabri de notre Québecois qui tente de faire au mieux pour ne pas se faire attendre. Mais nous avons tout le temps. Le visage commence à se crisper, et le plaisir du début de la sortie semble s'amenuiser. Nous repartons de plus belle, mais la pente se raidit drastiquement, sur un sol assez fuyant, rendant l'évolution assez compliquée, y compris à côté du vélo.  Ca en est trop, nous sommes en train de perdre André. Je suis un peu tendu de les avoir emmené là dedans, et espère que cela sera de courte durée. Le sentier est maintenant en balcon, n'aidant pas la peur du vide d'André. Nous avançons à tâtons hectomètre par hectomètre, avec l'envie furieuse d'arriver au fond du vallon. Une dernière épingle dans les rochers, et nous voici au fond du vallon avec un petit ruisseau à traverser. De l'autre côté, c'est le drame. Une remontée assassine qui nous aurait déjà bien fait suer en randonnée pédestre, alors avec un vélo, qui plus est équipé d'une batterie, cela relève de la mission. Heureusement, cela se calme vite. Nous ne parlerons toutefois pas non plus d'un retour à la normale. Je tente une avancée sur le vélo. Les camarades jonglent entre pédalage et poussette. Maintenant, des franchissements ravinés se profilent. J'arrive dessus en vélo, mais m'aperçoit rapidement que la dégringolade n'est pas loin. Je fais passer mon vélo, attrape celui des copains, et nous poursuivons avec le village tout proche maintenant. La végétation est très dense, frottant de part et d'autre les extrémités du guidon. Nous passons sous une maison pensant être au bout du tunnel, mais un dernier ruisseau plein de rochers est à franchir, avant une arrivée en douceur dans ce charmant et désiré village de Rochebrune.

Ce village est au bout du monde. A tel point que la place  centrale ne laisse aucune place au goudron. Seule la terre battue est présente, donnant une impression de temps arrêté au site, nous replongeant quelques décennies auparavant. J'apprécie qu'à moitié la beauté du village, soucieux de la suite des évènements. En remplissant mon bidon à la fontaine, j'entends discuter un couple dans son jardin en langue étrangère. Je tente une approche en anglais, pour les questionner sur la suite de l'itinéraire. Ce sont des allemands, mais nous arrivons à nous comprendre en anglais, et, miracle, ils connaissent bien le coin. Ils nous indiquent que le chemin suivant est "easy", et qu'il passe en voiture. Cela me rassure, surtout vis à vis d'André dont c'est le baptême. Je demande toutefois confirmation à des autochtones parlant bien français cette fois ci, et, ils confirment que nous seront sur des pistes jusqu'à la fin de l'itinéraire.

L'inquiétude suivante sera toutefois pour les filles pour qui il reste quelques cols, mais sans moteur pour elles. Nous sortons du village sur un agréable chemin nous propulsant à proximité d'une jolie ferme en pierre. La vue sur le village y est saisissante. C'est dur mais tellement beau, les préalpes se dévoilant en toile de fond pour parfaire la carte postale. Nous sommes au milieu de terres cultivées, marquant la fin de la montée vers le col de la Croix. Ce ne sera pas sans une nouvelle bonne suée, la pente finale étant assez raide. Une route nous permet quelques instants de récupération. Elle semble perdue au milieu de nulle part, mais en regardant sur la carte, nous sommes bien sur une départementale. Nous n'y croiserons aucune voiture toutefois. L'heure tourne, et la fin d'après-midi approche, et il reste pas mal de chemin à faire. Heureusement, les jours sont assez longs. Nous quittons rapidement la route pour une nouvelle piste qui nous conduit rapidement au col Soubeyrand. J'essaie de lire le paysage et de deviner la suite de l'itinéraire, avec l'espoir que le col qui se dresse devant nous ne soit pas notre prochain passage. mais ce sera bien le cas. L'orientation et l'altitude du prochain point de passage confirment bien que nous y allons droit devant. Je propose aux troupes de manger un bout, mais personne n'a d'appétit. Nous attaquons alors la montée tranquillou. Quelques coups de cul ponctuent les épingles, mais jamais trop long. C'était sans compter le dernier tiers de la montée qui se veut très raide et oblige la plupart à pousser à nouveau le vélo. Du sommet, un air frais se fait sentir, prenant la poudre d'escampette vers les sommets environnants ce nouveau col Saint Vincent.

J'indique aux troupes qu'il faut passer la croupe en face. Encore quelques mètres d'effort avant d'y arriver. Nous basculons de l'autre côté dans des prairies de moyenne montagne. Une rapide descente nous amène au carrefour du col de Linceuil. Cap à l'Est vers le dernier col de la journée, celui de Milmandre. Fort heureusement, ce dernier s'atteint avec une descente en balcon au dessus d'un vallon. Au col, un magnifique et imposant rocher se dresse devant nous. Du sommet, une aire de décollage pour les parapentes attend les prochains hommes ailés. C'est également un beau spot de grimpe pour les accrocs du mousqueton. Face à notre prochain cap, le Mont Ventoux se fait discret sous son imposant chapeau de nuages.  J'indique la délivrance aux camarades. Il reste pratiquement plus que de la descente jusqu'au bout.

Une belle piste en épingle dégringole le long de ce rocher. Des grimpeurs, à l'abri du vent, tente une dernière ascension à la lumière chatoyante de la fin de journée. Nous atteignons la route des Jonchiers après moult épingles. Nous poursuivons la descente vers la départementale en contrebas que nous suivrons sur quelques hectomètres. Je marque alors une pause afin de proposer deux scenarii aux compagnons. Soit un retour par la route, soit une piste qui arrive en face le camping avec encore 50m de dénivelé. Tous choisissent à l'unanimité la piste. J'ai fait un rapide calcul entre le point bas et le point haut pour arriver aux 50m de dénivelé. C'était sans compter les redescentes qui remettaient à chaque fois le compteur à 0. Au final, c'était 150m de dénivelé que nous avons du à nouveau franchir. Nous sommes sur le point de perdre Justine qui commence à avoir son compte. Mais cela aurait été dommage de pas prendre ce chemin ponctué de ruisseaux et de champs d'oliviers. Pas de doute, nous sommes bien en Provence. Un petit bout de route nous amène très rapidement au camping pour la fin de cette belle expédition.

Au final, 8 cols, 28 km et quelques 900m de dénivelé étaient au programme. C'était dur, il y a eu quelques galères, quelques souffrances physiques et morales, mais tout le monde a bien tenu le cap. Saluons le courage des compères qui ont eu beaucoup de pugnacité pour arriver au terme de cette balade. Mais quelle balade !!! Des paysages tous plus beaux les uns que les autres, des cailloux, une nature sauvage, un village hors du temps. Cela valait bien la peine de se décarcasser. Gageons que cette sortie marque le début d'un week-end tout aussi enchanteur. Réponse très prochainement.

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